Porosité intestinale et capacité d’assimilation des nutriments en ultra-endurance : le rôle des prébiotiques et des probiotiques

Les épreuves d'ultra-endurance exigent une préparation physique et mentale extrême. Mais ce n’est pas les seuls éléments déterminants pour la performance. Parmi les autres éléments fondamentaux on note la nutrition qui est aussi un point crucial pour maintenir un niveau d’énergie suffisant sur toute la durée de l’effort.

En parallèle de l’augmentation du temps d’effort les athlètes sont contraints d’augmenter leurs apports nutritionnels afin de rester performant et repousser l’arrivée de la fatigue. Cette hausse des apports nutritionnels demande aux athlètes une très bonne capacité d’assimilation des nutriments afin de ne pas se retrouver limiter par des troubles gastro intestinaux, extrêmement fréquents sur les épreuves longues dépassant les 4 heures d’effort [Nutritional intake and gastrointestinal problems during competitive endurance events.].

Cette capacité d’assimilation peut, cependant, être affectée par un syndrome qui touchent de nombreux athlètes d’ultra-endurance : la porosité intestinale, ou "leaky gut".

Qu’est-ce que le microbiote intestinal ?

Le tractus gastro-intestinal humain abrite une vaste et diversifiée communauté de micro-organismes, incluant des bactéries, des archées, des champignons, des virus et d'autres eucaryotes. Cette communauté de micro-organismes anaérobies est collectivement connue sous le nom de « microbiote intestinal » Le microbiote intestinal joue un rôle crucial dans la santé humaine en offrant des fonctions métaboliques, immunitaires et protectrices grâce à sa relation symbiotique avec son hôte.

Ce microbiote est essentiel pour une multitude de processus, y compris la dégradation des nutriments, la production de vitamines, et la modulation de la réponse immunitaire. Sa bonne santé est particulièrement importante pour les athlètes d’ultra-endurance, car un microbiote équilibré et fonctionnel permettra une bonne assimilation des nutriments et aidera à prévenir les risques de troubles gastro-intestinaux à l’effort.

Sources : Bidell, M.R., Hobbs, A.L.V., Lodise, T.P.: Gut microbiome health and dysbiosis: A clinical primer. Pharmacotherapy, 2022Thursby, E., Juge, N.: Introduction to the human gut microbiota. Biochem. J. (2017).

Introduction aux prébiotiques

Les prébiotiques sont des substances alimentaires non digestibles qui favorisent la croissance et l'activité des bactéries bénéfiques dans l'intestin, notamment les bifidobactéries et les lactobacilles. Ces composants résistent généralement à la digestion dans la partie supérieure du tractus gastro-intestinal et ne sont pas dégradés par les enzymes digestives humaines, ce qui leur permet d’atteindre le côlon, où ils servent de substrat pour la fermentation par le microbiote intestinal. Les prébiotiques se trouvent dans certains aliments comme les oignons, l’ail, les poireaux, les asperges, les bananes, les flocons d’avoine, l’orge, le son de blé et les légumineuses…

La porosité intestinale : un obstacle à l'assimilation des nutriments

Pendant les épreuves d’endurance prolongées, des troubles gastro-intestinaux (TGI) surviennent fréquemment, notamment en raison de l’ischémie splanchnique, qui réduit l’apport sanguin à l’intestin de 30 à 40 % lorsque l'intensité de l’effort dépasse 70 % du VO2 max (Association of gastrointestinal distress in ultramarathoners with race diet.). Ce phénomène conduit à une diminution de l’oxygénation de la muqueuse intestinale, provoquant une inflammation et une augmentation de la perméabilité intestinale. Ce phénomène, connu sous le nom de "porosité intestinale", compromet la barrière intestinale, permettant le passage de toxines et de particules alimentaires non digérées dans le système sanguin pouvant entraîner des inflammations systémiques et des troubles gastriques sévères. Ces troubles digestifs, incluant nausées, crampes, vomissements… touchent, en général, plus de la moitié des coureurs d'ultra-marathon. (Source : Stuempfle K.J., Hoffman M.D., Weschler L.B., Rogers I.R., Hew-Butler T. Race diet of finishers and non-finishers in a 100 mile (161 km) mountain footrace.)

Facteurs influençant la perméabilité intestinale

Le phénomène d’hyperperméabilité intestinale (IP) se défini comme une fragilisation de la muqueuse de l’intestin grêle qui, en devenant poreuse, va permettre le passage de nutriments, de bactéries et de déchets qui ne devraient pas pouvoir passer cette barrière intestinale.

La perméabilité intestinale peut être influencée par divers facteurs, que ce soit des modifications du microbiote intestinal, un stress chronique, l'utilisation d'anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), la consommation d'alcool, les infections, ou encore certaines pathologies médicales. Ces facteurs affaiblissent la barrière intestinale, augmentant ainsi la porosité intestinale et la propension aux inflammations et aux troubles gastro-intestinaux. Les habitudes de vie et alimentaires jouent également un rôle significatif dans l’apparition de ce phénomène. Source : Bischoff, S.C., Barbara, G., Buurman, W., Ockhuizen, T., Schulzke, J.-D., Serino, M., Tilg, H., Watson, A., Wells, J.M.: Intestinal permeability – a new target for disease prevention and therapy. BMC Gastroenterol. 14 (1) (2014).

Les athlètes d'ultra-endurance sont d’autant plus exposés à ce risque de porosité intestinale en raison des contraintes mécaniques et physiologiques associées aux efforts (impacts, ischémie du système digestif…). Il est donc indispensable pour ces athlètes de prendre extrêmement soin de leur système digestif et d’adapter leur alimentation afin de maintenir une muqueuse intestinale optimale.

Importance des prébiotiques et des probiotiques dans l’optimisation des capacités d’assimilation

Pour lutter contre les risques de troubles gastro-intestinaux, la recherche se concentre de plus en plus sur l’utilisation quotidienne de prébiotiques, de probiotiques, de postbiotiques qui contribuent à améliorer la santé intestinale, réduire la porosité intestinale et, par conséquent, optimiser l'assimilation des nutriments.

En renforçant la barrière intestinale, les probiotiques permettent non seulement de réduire le risque de TGI, mais augmentent également la capacité d’absorption des nutriments essentiels, indispensable pour les athlètes d’ultra-endurance qui comptent sur un apport constant d'énergie pour le maintien de leurs performances.

Réduire les TGI pour un maintenir des apports énergétiques constants

Les TGI ne sont pas seulement inconfortables, ils sont la raison numéro un d’abandon sur les épreuves d’endurance. Ces troubles sont plus importants sur les épreuves de course (Tout comprendre sur les origines des troubles Gastro Intestinaux), comparativement à d’autres activités d’endurance, cela s’explique par la répétitions des impacts au sol. Des recherches montrent que les prébiotiques, en stimulant la production de butyrate, un acide gras à chaîne courte qui renforce la barrière intestinale, peuvent améliorer la tolérance intestinale et ainsi réduire la fréquence et la sévérité des troubles GI. Une meilleure tolérance digestive permet donc aux athlètes de continuer à s’alimenter réduisant ainsi le déficit énergétique souvent observé dans les épreuves d’ultra-endurance.

Sources : Stuempfle KJ, Hoffman MD. Gastrointestinal distress is common during a 161-km ultramarathon. J Sports Sci. 2015 https://www.mdpi.com/2072-6643/15/20/4330

Prébiotiques et probiotiques : des alliés contre la déshydratation et la surcharge hydrique

Un autre facteur important est l’équilibre hydrique. Une hydratation inadaptée, que ce soit par déshydratation ou par surhydratation, augmente les risques de TGI, notamment en contribuant à l’hyponatrémie et à l’hypoperfusion splanchnique. La consommation régulière de prébiotiques et de probiotiques pourrait aider à maintenir cet équilibre hydrique en réduisant l'inflammation intestinale et en améliorant la tolérance du système digestif aux fluctuations de liquides. Des études ont montré que les athlètes avec une hydratation adaptée et un microbiote intestinal équilibré sont moins sujets aux perturbations électrolytiques et aux TGI pendant les épreuves de longue durée. Sources : Wasse LK. Importance of gastrointestinal function to athletic performance and health https://www.mdpi.com/2072-6643/16/5/744.

Adapter la stratégie nutritionnelle grâce à un microbiote sain

Au-delà de la réduction des TGI, un microbiote intestinal sain permet également d’optimiser la stratégie nutritionnelle. Bien que les recommandations générales pour les athlètes d’ultra-endurance suggèrent de consommer entre 60 et 90g de glucides par heure pour maintenir un niveau de performance optimal, beaucoup de coureurs, même bien entraînés, peinent à atteindre ces apports (Source: Knechtle B, Bisig A, Schlapfer F, Zwyssig D. Energy metabolism in long-term endurance sports: a case study. Praxis. 2003). Ainsi une meilleure assimilation des nutriments grâce à une santé intestinale renforcée permettrait déjà à ces athlètes de tirer le maximum de chaque bouchée ou gorgée.

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Conclusion : investir dans la santé intestinale pour des performances optimales

Dans le contexte des épreuves d’ultra-endurance, où les limites physiques et mentales sont mises à l’épreuve, la capacité de l’organisme à assimilation les nutriments apportés est un facteur décisif.

La porosité intestinale, phénomène accentuée par les contraintes mécaniques et l’intensité des efforts, reste un frein majeur à l’absorption efficace des nutriments. Intégrer des prébiotiques et des probiotiques semble alors être une solution efficace pour renforcer la barrière intestinale, réduire les risques de TGI et optimiser la capacité d'assimilation. Cette stratégie nutritionnelle, axée sur la santé intestinale, devient un pilier essentiel pour les athlètes cherchant à atteindre leur plein potentiel lors de ces épreuves extrêmes.